Stratégie « J’ai investi dans le pâturage et c’est rentable »
Installé depuis deux ans à Plogastel-Saint-Germain (Finistère) en Gaec avec deux associés, Cédric Tymen a concentré ses investissements dans les aménagements visant à développer le pâturage. Il en récolte déjà les bénéfices.
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Pour Cédric Tymen, jeune éleveur dans le Finistère, produire du lait à base d’herbe pâturée est une évidence. Après avoir obtenu un BTS, il a poursuivi sa formation en travaillant dans des fermes laitières en Nouvelle-Zélande durant deux ans et demi. Il s’est installé en 2021 avec son père Jean-Charles et son oncle Philippe Stéphan.
L’exploitation, convertie en bio depuis 2019, produisait alors 450 000 l de lait sur 85 ha avec 80 vaches. Dès 2011, les éleveurs s’étaient lancés dans le croisement trois voies (holstein néo-zélandaise x rouge scandinave x jersiaise) et groupaient les vêlages sur le printemps (2/3) et l’automne (1/3). Ils avaient mis en place un système herbager en créant des chemins, mais le réseau d’eau était vieillissant et d’un débit insuffisant. Surtout, la surface accessible se limitait à 33 ha.
Échanges parcellaires
Inspiré par ce qu’il avait vu en Nouvelle-Zélande, Cédric voulait grouper les vêlages à 100 % au printemps. «Caler la production sur la pousse de l’herbe se révèle très efficace sur le plan de l’économie, du travail et de l‘environnement », estime l’éleveur. Ses associés ont accepté. Développer le pâturage impliquait cependant d’agrandir la surface accessible. Et, pour dégager trois revenus, il fallait parvenir à livrer 200 000 litres supplémentaires. Sachant que le bâtiment ne pouvait accueillir que 90 vaches, cela ne pouvait se faire qu’au prix de quelques aménagements.
L’opportunité de reprendre 30 ha à 20 km s’est présentée. Un voisin qui travaillait déjà une surface importante accolée à l’élevage de Cédric était intéressé. Un arrangement a été trouvé entre eux. Cédric a repris les 30 ha, puis négocié un échange parcellaire avec son voisin. D’autres opérations de ce type ont permis d’augmenter la surface accessible à 70 ha, dont 60 en accès direct, sans traverser la moindre route. «À chaque fois, on a perdu un peu de surface dans les échanges, mais l’essentiel était d’améliorer la structure de notre parcellaire », résume Cédric.
Aménager les paddocks et les chemins
Les parcelles ont d’abord été divisées en 52 paddocks adaptés à un pâturage durant 24 à 48 heures. Ensuite, il a fallu aménager un réseau de chemins pour desservir l’ensemble des prairies. 750 mètres de voies nouvelles ont été créés. Au total, 22 000 € ont été investis dans ce chantier confié à une entreprise. « L’eau est l’ennemi des chemins, explique Cédric. Il faut les surélever par rapport aux parcelles pour favoriser l’évacuation de et limiter le développement de la végétation qui empêche l’écoulement. » Ces chemins sont réservés aux animaux, les engins utilisent d’autres accès.
Le chantier suivant concernait la remise à neuf du réseau d’eau, effectuée par les éleveurs. Pour amener le débit à un niveau suffisant pour 130 vaches, une cuve tampon de 10 m3 et un surpresseur ont été installés. Le nouveau réseau comprend de grandes artères (diamètre 32) et des ramifications (diamètre 25). Les tuyaux sont posés au sol, sous les clôtures.
Bale grazing pour les taries en hiver
Les éleveurs ont choisi des bacs en béton, solides, faciles à nettoyer et d’une durée de vie longue. . Ce chantier a été mené en deux ans pour étaler la charge de travail et l’impact sur la trésorerie. L’investissement avoisine les 5 000 €.
Les vêlages ont été progressivement concentrés de février à avril. Parce que le bâtiment ne peut pas accueillir tous les animaux en hiver, mais aussi pour mieux valoriser l’herbe, les taries sont en bale grazing. Ce sont celles qui ont été inséminées les premières qui sortent et elles vêlent dehors. Cédric constitue plusieurs lots de 25 à 30 têtes, les génisses restent entre elles pour leur épargner la concurrence.
Les fraîches vêlées commencent le déprimage des prairies et sont regroupées en fonction de la qualité de leur lait, consommable ou non. Le colostrum est stocké dans un tank annexe à température ambiante. Brassé, il s’acidifie et sert à nourrir les veaux. Ce sont ainsi 12 000 l de lait non commercialisables qui sont valorisés dans la ration des génisses de renouvellement. Une économie non négligeable.
Cette conduite calée sur les vêlages de printemps permet de rationaliser le travail. Les animaux se trouvent dans des lots homogènes et ont tous les mêmes besoins. Après la saison des vêlages vient celle des inséminations. En automne, les éleveurs passent en mono-traite avant de fermer la salle de traite durant environ un mois.
Du maïs pour favoriser la reproduction
Cédric a maintenu le maïs dans l’assolement. Il le sème derrière les parcelles en bale grazing. Les rendements atteignent de 7 à 9 t de MS. «On donne 5 kg de MS d’ensilage de maïs au moment de la mise à la reproduction, pour apporter de l’énergie en complément d’une herbe riche en azote soluble», détaille l’éleveur. Car, dans un système basé sur les vêlages groupés, les performances à la reproduction doivent être assurées. Le maïs est parfois nécessaire aussi en été, quand l’herbe manque. Mais la quantité ne dépasse jamais 5 kg pour éviter de devoir corriger la ration en azote. Le passage en mono-traite en été est envisagé comme levier en cas de ressources fourragères insuffisantes.
Préserver la fertilité du sol
L’inconvénient de ce système très herbager et bio réside dans sa dépendance à la météo. Quoiqu’il arrive, il faut constituer des stocks. Acheter du fourrage coûte trop cher. Cédric gère le chargement en fonction de cet impératif. Il se situe à 1,3 UGB/ha, contre une recommandation à 1 en bio. Cédric cherche l’équilibre entre le maintien de la fertilité des sols, grâce à une bonne répartition des déjections au pâturage, et une production fourragère suffisante pour être autonome.
«Le développement du pâturage est essentiel pour écraser les charges. Les achats sont réduits au minimum ce qui nous permet de vivre à trois avec 650 000 l de lait vendu. » Les investissements réalisés pour étendre la surface accessible seront vite amortis. Aujourd’hui, le coût alimentaire s’établit à 35 €/1 000 l de lait, la marge brute est à 510 €/1 000 l.
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